Toute une semaine d’immersion sur des sites à risque à Abidjan, Bingerville, Jacqueville et Sassandra pour en comprendre les causes et mesurer l’ampleur et les conséquences avec les outils de la géomatique. Du 15 au 20 janvier 2024, les étudiants de la classe de Master 1 du Centre universitaire de recherche et d’application en télédétection (Curat) de l’Université Félix Houphouët-Boigny de Cocody, ont fait ce qui est appelé l’Ecole de terrain.
Une semaine d’immersion sur le terrain, loin des amphis. Objectif : toucher du doigt des réalités environnementales qui attendent des solutions durables. C’est à cet exercice pratique qu’une trentaine d’étudiants de Master 1 du Centre universitaire de recherche et d’application en télédétection (Curat), se sont livrés du 15 au 20 janvier 2024. Cette activité phare de ce centre d’excellence logé au sein de l’université Félix Houphouët-Boigny, est baptisée l’Ecole de terrain.
Leurs encadreurs à leur tête, les nouveaux apprenants du Curat ont été conduits sur différents sites naturels présentant des risques géologiques et d’érosion avérés. De l’exutoire de l’Indénié à Adjamé, aux mangroves exubérantes de Sassandra en passant par la plage de sable fin de la presqu’île de Jacqueville, la grande vallée de Djorogobité et les plateaux accidentés de Bingerville, le périple fut pour le moins épuisant mais ô combien exaltant pour ces aspirants géomaticiens.
Bottes aux pieds, bloc-notes et Gps portatifs en main, casquettes et lunettes de soleil pour certains, ils suivaient dans une discipline frappante leurs encadreurs dans les méandres du trajet. Le regard enthousiaste et curieux, la soif de connaissance se lisait sur leurs visages ainsi que dans leurs attitudes. Chez les encadreurs, le désir de transmettre le savoir était aussi perceptible.
A chaque étape, le rituel se répétait : description du site par les encadreurs, échanges interactifs avec les étudiants, exercices pratiques. La symbiose entre les enseignants et les étudiants était totale. De quoi rendre fier et optimiste le Prof. Adonis Kouamé, maitre de conférences en télédétection et système d’information géographique au Curat, responsable de l’Ecole de terrain des Master 1.
« Le système Lmd se veut assez pratique et donc plus proche de la réalité du terrain. Nous sommes pleinement inscrits dans cette démarche au Curat, afin qu’à fin de leur formation, nos étudiants aient déjà suffisamment de connaissances du terrain et qu’ils soient prêts à travailler et à faire progresser la science », a-t-il expliqué.
Et d’ajouter : « cette sortie a pour but de leur montrer comment les outils d’observation de la terre, le spatial, pourraient être utilisés dans divers domaines et leur faire découvrir les risques environnementaux auxquels ils devront contribuer eux aussi à trouver des solutions concrètes et durables. En voyant leur détermination, cela nous rend fiers et nous rassure que la recherche dans ce domaine a encore de beaux jours en Côte d’Ivoire ».
Susciter des vocations
A Abidjan, les étudiants ont visité des ouvrages réalisés par l’Etat de Côte d’Ivoire pour atténuer les risques d’inondation, à l’exutoire de l’Indénié et au bassin d’excrétion Plateau-Dokui, et un site présentant des risques de glissement de terrain à Djorogobité. Sur place, ils ont été instruits sur les causes anthropiques et naturelles de la vulnérabilité de ces ouvrages et les défis de leur maintenance.
A Bingerville, ils ont découvert un site où une voie publique et des bâtisses sont englouties par le sable et autres sédiments, ce qui leur a permis de mesurer les conséquences des inondations. Là-bas, ils ont été aussi soumis à un exercice de cartographie par Gps.
A Jacqueville, située à 60 Km d’Abidjan, il était question pour eux d’étudier l’évolution de la plage avec les outils de la géomatique. Il faut dire que la plage de cette station balnéaire lovée entre les eaux de la lagune au nord et celles de l’Atlantique au sud, est l’une des plus mouvementées du Golfe de Guinée, ce qui entraine souvent des phénomènes de submersion et d’érosion de la côte.
Enfin, à Sassandra, il était aussi question d’étudier les mêmes enjeux côtiers, mais là, avec un accent particulier sur la dynamique de l’embouchure et des mangroves de la rivière éponyme qui sont sujettes à une surexploitation. Constituant pourtant l’un des meilleurs sites écotouristiques de la Côte d’Ivoire, la rivière, la plage et les mangroves de Sassandra sont aujourd’hui en danger du fait des activités humaines incontrôlées.
Les différents circuits de cette sortie terrain ont été animés par les Drs Jean Danumah, Aka Blash, Jeanne Kouadio Maffouet, Brice Mobio, Jacques Tiémélé, le responsable pédagogique numérique du Curat, Emmanuel Kra et son assistant pédagogique Ange Ouffoué. Toute l’activité s’est déroulée sous la supervision du Prof. Adonis Kouamé.
Précisons que deux visites en entreprise ont été aussi au menu de l’Ecole de terrain : une à la Direction de la cartographie et de la prospection géologique (Dcpg) du ministère des Mines, du Pétrole et de l’Energie et l’autre au Centre d’information géographique et du numérique (Cign) du Bnetd.
Pour Aminou Kadri, étudiant nigérien venu du Niger se former au Curat, l’expérience qu’il vient de vivre est unique et enrichissante. Et apparemment, elle lui a permis de trouver déjà sa voie. « Ce programme m’a permis de faire beaucoup de découvertes, tant au plan de la connaissance du pays profond que de la manipulation des outils. J’ai découvert de nouvelles villes et j’ai eu à manipuler les Gps portatif et différentiel. J’ai beaucoup apprécié la partie des géorisques et inondations dans lesquels je veux devenir spécialiste. Car chez moi au Niger, il y a chaque année de fortes inondations qui font des morts et auxquelles il faut trouver des solutions », s’est-il félicité.
En organisant l’Ecole de terrain, le Curat n’entendait pas remplir uniquement des obligations pédagogiques, mais transmettre à ses apprenants les gènes et le goût de la recherche pour un engagement sociétal porteur d’espoir.
Source : Par Faustin Ehouman Fraternité Matin.